Le constat serait fait du choix de certaines entreprises d’enfreindre délibérément les réglementations qui leur sont applicables, choix favorisé par une balance « risque de condamnation/opportunité financière » déséquilibrée. Ces entreprises seraient en mesure d’opérer un tel choix en raison non seulement d’un manque des actions et plaignants, mais également d’une insuffisance des sanctions encourues. Fort de ce constat, le législateur a introduit en droit français un nouveau mécanisme juridique, codifié à l’article 1254 du Code civil, tendant à lutter contre de tels comportements qualifiés de « fautes lucratives ».
L’action de groupe, instaurée par la loi « Hamon » du 17 mars 20141, n’a pas eu le succès escompté. Dans un rapport déposé au Sénat le 24 janvier 20242, il était notamment relevé que seulement 35 actions de groupe avaient été exercées depuis son entrée en vigueur et que nombre de ces actions avaient échoué, en partie du fait du désistement des demandeurs. Plusieurs éléments ont été invoqués pour expliquer cet échec :
– un champ d’application trop limité, concernant à l’origine le seul droit de la consommation, puis progressivement étendu aux produits de santé, aux litiges en matière environnementale, de protection des données personnelles, de discrimination dans le cadre du travail, de préjudices causés par une personne morale publique ou un organisme privé chargé de la gestion d’un service public, et de location d’un bien immobilier3 ;
– une qualité pour agir ouverte à trop peu d’acteurs ;
– un régime procédural disparate, différent selon la catégorie d’action de groupe envisagée.
Face à cet échec, partagé par d’autres Etats européens, l’Union européenne a adopté le 25 novembre 2020 la directive n° 2020/1828, transposée – tardivement – en droit français avec la loi n° 2025-391 du 30 avril 2025. Parmi les innovations de ce texte figure le nouvel article 1254 du Code civil, intégré dans un chapitre intitulé « Sanction civile en cas de faute dolosive ayant causé des dommages sériels ».
Cet article introduit en droit français un nouvel outil complétant l’arsenal juridique visant à sanctionner les dommages « sériels », qui pourra être mis en œuvre en parallèle d’une action de groupe. Ces deux actions diffèrent à plusieurs égards :