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Proposition de loi – Lutte contre les fraudes aux aides publiques

Publié le 21 juillet 2025 à 17h37

Cornet Vincent Segurel    Temps de lecture 9 minutes

La proposition de loi déposée par Thomas Cazenave, le 15 octobre 2024, a finalisé son processus d’adoption après que le Sénat s’est prononcé favorablement, le 21 mai dernier, sur les conclusions de la commission mixte paritaire.

Par Clément Launay, avocat, et Christian Naux, avocat associé, Cornet Vincent Segurel

Il est vrai que les chiffres annoncés ici et là imposaient d’agir.

En 2023, Tracfin indiquait que les soupçons de fraude à maprimrénov’ s’élevaient à 400 millions d’euros, soit 16 % du budget 2023 de ladite aide.

En 2024, la Cour des comptes constatait « d’importants phénomènes de fraude, en particulier dans le secteur du bâtiment » au sujet des certificats d’économies d’énergie ; le chiffre de 480 millions euros de fraudes à ce sujet était avancé.

La haute juridiction financière appelait alors à faire de la lutte contre la fraude « un plan d’ensemble, pour favoriser notamment l’automatisation des contrôles ».

Les ambitions du projet de loi, dont l’exposé dénonçait le « fléau social, économique et moral » que constitue la fraude « sous toutes ses formes », étaient triples :

– améliorer et simplifier l’action administrative de la lutte anti-fraude, notamment en luttant contre les effets de silo constatés entre les différentes entités concernées, autrement dit l’absence de travail de coopération entre différentes administrations susceptibles de détenir des informations ;

– renforcer la protection des consommateurs dans la transition énergétique ;

– protéger contre le démarchage téléphonique, présenté par le ministère de l’Economie devant le Sénat comme la vitrine « d’énormes mécanismes de fraude et de vol ».

1. La volonté législative de sanctionner les fraudeurs d’une part et d’autre part de favoriser les échanges interadministrations sur ce sujet est manifeste ; pour autant, le caractère adapté ou non de certains dispositifs peut interroger.

Tout d’abord, il est désormais prévu que l’existence d’indices sérieux de manquements délibérés ou de manœuvres frauduleuses en vue d’obtenir indûment une aide pourra justifier la suspension du versement de cette aide pour une durée de trois mois, éventuellement renouvelable pour la même durée.

Ces mêmes comportements peuvent justifier le rejet des demandes d’aide.

Reste que la pertinence de ces dispositions peut interroger sur leur principe et leur mise en pratique :

– la notion d’indice de manquement délibéré, vague et nécessairement subjective, devra donner lieu à des discussions prétoriennes vives et animées avant que les hautes juridictions déterminent une définition satisfaisante, à tout le moins qui mettra fin aux difficultés qui seront vraisemblablement rencontrées devant les juges du fond ;

– la durée de la suspension, trois mois et éventuellement six, interroge quant à son caractère dissuasif ;

– le principe du rejet d’une demande d’aide publique reposant sur des pratiques frauduleuses interroge quant à la pertinence de ce que nous n’espérons être que la formalisation d’une pratique déjà habituelle.

Les articles 2 et suivants du projet de loi imposent désormais à la cellule de renseignement financier national (Tracfin) de saisir le Parquet européen de tous faits susceptibles de constituer une infraction portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union et envisage également la possibilité de :

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