Parole d'expert - PwC Société d'Avocats

Réforme e-Invoicing : Quand la donnée devient stratégique

Publié le 25 juillet 2025 à 13h50

PwC Société d'Avocats    Temps de lecture 6 minutes

Avec une mise en œuvre progressive dès septembre 2026, la réforme française vise à moderniser les échanges B2B et à lutter contre la fraude à la TVA. Elle s’aligne sur les initiatives internationales, notamment européennes (mais également à une échelle plus globale, en passant par l’Amérique Latine et l’Asie), avec la norme EN16931 et le projet ViDA. Dans ce contexte, la donnée devient un levier central pour les entreprises : bien que des standards communs existent, chaque pays adapte les modèles aux réalités locales.

Par Lisa Fécard Associée, PwC Société d’Avocats, Laurent Poigt Associé, PwC Société d’Avocats, Anthony Andary Senior Associate, PwC Société d’Avocats

Avant d’aborder les enjeux liés à la data, il est essentiel d’en définir les différentes typologies.

1- Typologie des données impliquées et enjeux

Dans les systèmes d'information, il est essentiel de distinguer les données référentielles, des données transactionnelles.

Les données référentielles (communément appelées “Master Data”) décrivent des éléments stables et structurants de l'organisation : clients, fournisseurs, articles, etc. Elles servent de socle commun à l’ensemble des processus métiers.

À l’inverse, les données transactionnelles sont générées par les opérations quotidiennes de l’entreprise : une commande, une facture, un paiement ou une livraison. Elles sont dynamiques, temporelles et souvent liées à un événement précis.

Dans le cadre de la facturation électronique, cette distinction est fondamentale car chacune de ces données permettra – outre de renforcer le contrôle interne et la lutte contre la fraude notamment côté fournisseur – sécuriser un aspect distinct de la réforme, ainsi que ses enjeux :

• La donnée référentielle permet d'identifier notamment les parties prenantes d’une transaction (notamment l’acheteur et le vendeur). Elle permet également de router la facture vers la bonne plateforme partenaire de réception, identifiée via des éléments comme le SIREN, SIRET, code de routage ou adresse électronique (SIREN_SUFFIXE). Elle permet également de répondre aux exigences fiscales qui nécessitent un minimum d’informations concernant les différentes parties impliquées (par exemple le numéro de TVA, l’adresse, etc.). Il est donc crucial de garantir la qualité de ces données pour éviter les erreurs de routage et les rejets.

• La donnée transactionnelle assure le respect des mentions obligatoires sur les factures. Les formats sémantiques publiés (par la DGFIP ou l’AFNOR en France) ne couvrent pas toujours toutes les obligations légales (CGI, Code du commerce, BOFIP en France). Il est donc essentiel de les appréhender à la lumière des textes de loi.

Elle conditionne également la conformité des flux (factures électroniques, e-Reporting, statuts) aux règles de gestion spécifiques, afin d’éviter les rejets techniques.

Au-delà des obligations réglementaires, elle répond aux besoins métiers propres à chaque entreprise. Cela implique d’identifier les cas d’usage, cartographier les données nécessaires et s’assurer de leur bonne intégration.

Enfin, certaines données, bien que non obligatoires, sont attendues par les clients pour faciliter l’intégration des factures (ex. : identifiant d’article). Il est donc important de les identifier et de les intégrer dans les bons champs des formats structurés.

2- Les bonnes pratiques à reproduire et les écueils à bannir

Afin de mener à bien le projet de mise en conformité avec les obligations de facturation électronique et plus spécifiquement sécuriser la qualité et la conformité des données, il est essentiel de suivre les bonnes pratiques suivantes :

• Mettre en place pour chaque plateforme une équipe pluridisciplinaire comprenant les équipes opérationnelles et l'IT​ : les équipes IT n’ayant très souvent pas une vision exhaustive des cas métiers applicables à la société et les opérationnels n’ayant pas une maîtrise technique des outils, ces 2 profils se complètent et doivent nécessairement être impliqués dans les travaux.

• Se tenir informé des travaux et communications des autorités locales et faire le lien avec les cas d’usage​ : les formats sémantiques et la liste des cas d’usage sont susceptibles d’évoluer dans le temps. En France, par exemple, des ateliers de travail sont mis en place auprès de la commission AFNOR, qui publie fréquemment de nouvelles versions du format sémantique et des cas d’usage. Il est donc important de mettre en place une veille sur ces publications afin d’anticiper les évolutions.

• Comprendre la finalité des travaux et anticiper les étapes d’après (notamment poser le mapping pour la configuration de la solution PDP)​ : Dans un contexte où plusieurs entreprises comptent sur leurs PDP pour enrichir les données de la facture, il est important de réaliser que cette responsabilité incombe aux entreprises uniquement, et qu’il faut anticiper les travaux en vue de réaliser le mapping entre le fichier en sortie de vos outils et le format attendu par votre PDP.

• Avoir en tête que les enjeux Data ne concernent pas uniquement l'obligation de e-Invoicing, mais également l'obligation de e-Reporting​ : en France, mais également prochainement en Belgique, il existe d’autres obligations que celle de facturation électronique. Que cela concerne le e-Reporting ou le cycle de vie, il est important de noter que chaque typologie de flux est concernée par son propre format sémantique. Des travaux doivent donc être prévus à l’avance pour chaque typologie de flux et d’obligation concernant la société.

Il existe également un certain nombre d’écueils qui doivent être bannis afin d’éviter tout retard dans le projet et minimiser les risques de non-conformité :

• Sous-estimation des enjeux et manque d’anticipation des travaux

De nombreuses entreprises sous-estiment l’importance du projet de facturation électronique, le reléguant derrière d’autres priorités (migration ERP, audits, clôtures, etc.). Cette dépriorisation, souvent liée à un manque de sensibilisation des équipes IT et métiers, entraîne une mobilisation tardive, risquant de compromettre les délais. Par ailleurs, les travaux d’évolution des systèmes sources, comme la création de nouveaux champs, sont souvent perçus à tort comme rapides à mettre en œuvre. Or, les éditeurs étant sollicités par des milliers d’entreprises, ces évolutions peuvent prendre plusieurs mois. Il est donc crucial de sensibiliser les équipes dès maintenant et de planifier les travaux suffisamment en amont pour sécuriser le projet.

• Ne pas de se faire aider pour le nettoyage et l’enrichissement des référentiels, pour les travaux de mapping, pour les transcodifications à faire faire par la solution PDP retenue… : préférant internaliser les travaux, de nombreuses entreprises se retrouvent souvent bloquées. Il est important de noter que les travaux de mise en conformité avec la réforme, et plus spécifiquement les travaux liés à la Data, nécessitent une expertise pointue sur le sujet.

En synthèse, il est essentiel de bien comprendre la finalité des travaux autour de la Data, de les anticiper en avance de phase et de mettre en place une feuille de route précise. Vérifier la disponibilité des données dans les formulaires facture, dans les outils. Tester la qualité des données référentielles. Mettre en place une gouvernance opérationnelle efficace autour de la Data pour sécuriser l’analyse de la TVA et anticiper le contrôle fiscal de demain. Par où allez-vous commencer ?

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