Métier

Les regtechs attirent les talents

Publié le 22 novembre 2019 à 16h34    Mis à jour le 22 novembre 2019 à 18h04

Thomas Feat

Spécialisées dans l’accompagnement à la mise en conformité réglementaire des institutions financières, les regtechs comptent aujourd’hui pour près du quart des fintechs de l’Hexagone. L’écosystème, en forte croissance et de plus en plus diversifié, attire à lui une grande variété de profils.

L’écosystème français des regtechs a connu ces dernières années une très forte croissance. A tel point que ces entreprises, spécialisées dans l’accompagnement à la mise en conformité réglementaire des institutions financières grâce à des technologies de pointe, comptent aujourd’hui pour plus du quart des fintechs de l’Hexagone. «De Netheos à Flaminem, en passant par Trustpair ou Yousign, on dénombre plus d’une cinquantaine de regtechs sur le territoire, spécialisées dans la gestion de l’identité et de la connaissance client, la veille réglementaire, la surveillance des transactions et l’analyse des risques», détaille Alain Clot, président-fondateur de France Fintech.

Cet écosystème en perpétuelle évolution du fait de la demande toujours plus forte des acteurs financiers et du renouvellement permanent des innovations technologiques constitue, de surcroît, un vivier d’emplois extrêmement dynamique. Si l’univers des fintechs a recruté quelque 8 000 à 10 000 talents ces cinq dernières années, le nombre avoisine les 1 000 à 1 500 pour les regtechs, selon un connaisseur du secteur, membre de la French Tech. Un chiffre qui pourrait selon lui être multiplié par cinq dans les trois prochaines années, croissance du secteur oblige. «En 2018, les regtechs ont capté 7 % des fonds investis dans la Fintech, soit 25 millions d’euros, un chiffre en augmentation de 50 % sur un an. L’écosystème se dote de moyens économiques toujours plus importants, et se trouve donc en mesure de recruter de plus en plus de talents», indique pour sa part Edouard Plus, managing director de l’incubateur de fintechs Le Swave, qui compte sept regtechs dans son vivier.

Des spécialistes du droit et de la finance

En général, ces talents mobilisent trois types de compétences, sorte de tronc commun immuable. Le premier est d’ordre réglementaire. «Souvent, ces profils juridiques ont évolué dans de grands cabinets de conseil ou d’avocats, et ont acquis une connaissance exhaustive des textes européens, directives et règlements (MIFID II, DSP 2, etc.), desquels émane 80 % de la réglementation financière relative aux services fournis par les regtechs», indique Alain Clot. De surcroît, ils doivent être au fait du fonctionnement des instances de régulation nationales et communautaires. «L’activité des regtechs est encore peu régulée en France. Celle-ci dépend encore très fortement de discussions ex ante menées avec l’ACPR et l’AMF», explique Alain Clot.  

Ensuite, l’écosystème regtech attire à lui de nombreux profils ayant développé des expertises financières extrêmement pointues. «Les clients des regtechs sont nombreux : sociétés de gestion, investisseurs institutionnels, banques, assureurs, courtiers, experts-comptables, etc. Les collaborateurs doivent être au fait de toutes leurs problématiques métier et des environnements business dans lesquels ils évoluent», insiste Edouard Plus. Pour ces raisons, les jeunes pousses n’hésitent pas, aujourd’hui, à recruter des talents chez leurs clients. Dernièrement, certaines regtechs parmi les plus matures de l’écosystème se sont mises à opérer dans plusieurs de ces industries. «Dans ce cas, les spécialistes recherchés ont souvent évolué à des postes de direction clés, dans la banque par exemple, où ils ont pu acquérir une vision à 360° de ces métiers», détaille Alain Clot.

L’importance croissante de l’IA

Parce qu’elles développent et mobilisent des technologies de pointe, les regtechs recrutent enfin des profils techniques hautement qualifiés. Un certain nombre de compétences sont ciblées. Premièrement, dans la construction puis dans la gestion quotidienne des applications informatiques. «On parle ici de développeurs capables d’intervenir sur toutes les couches de ces applications, du back-end au front-end en passant par l’expérience utilisateurs», précise Alain Clot. Deuxièmement, pour l’analyse et le traitement des données, l’un des piliers de l’activité des regtechs, ceux-ci pouvant être largement optimisés au moyen de solutions d’intelligence artificielle. «Les regtechs font notamment appel au machine learning et au traitement automatique des langues (TAL), technologies qui requièrent l’intervention de profils très spécialisés», souligne Alain Clot. Par-delà les ingénieurs, les fonctions commerciales doivent également démontrer une très forte coloration technologique. «Dans une regtech, un business developer, dont la première mission est de faire croître l’activité de l’entreprise, devra avoir une connaissance parfaite du produit ou de la solution mise au point», illustre Edouard Plus.

Corollaire de la croissance rapide de l’écosystème, les regtechs françaises s’internationalisent. «Cette expansion est alimentée par l’universalité des problématiques adressées par ces entreprises : quel que soit le pays ou la région, les institutions financières sont assujetties à des réglementations exhaustives et soumises à un risque de défaut de conformité élevé», note Edouard Plus. Aussi, les profils recrutés par les start-up françaises sont-ils issus d’horizons géographiques différents. «Créé en 2014, Neuroprofiler, spécialiste de l’on-boarding client dans le domaine de l’investissement, est présent depuis 2017 à Paris, Londres et Zürich, indique Edouard Plus. Chacun des hubs est dirigé par un manager local qui connaît parfaitement son marché.»

Une proximité avec les incubateurs et universités

Opportunément, les regtechs peuvent désormais compter sur diverses structures pour les aider à recruter les meilleurs talents. Certains incubateurs, à l‘instar du Swave, ont bâti des partenariats avec des établissements d’enseignement supérieur comme l’université Paris I Panthéon-Sorbonne et l’université Paris-Dauphine dont l’objet est de bâtir des CVthèques consultables par les start-up. «En outre, les étudiants peuvent rencontrer leurs potentiels employeurs et réaliser des séminaires dans nos locaux», précise Edouard Plus. A l’initiative de la petite dizaine de chaires fintechs existant désormais en France, les entrepreneurs ont également la possibilité de rencontrer les étudiants à l’occasion de journées «employeurs» sur les campus. L’écosystème a beau être jeune, ces connexions avec le monde estudiantin et de la recherche s’établissent à grande vitesse.

Des rémunérations de plus en plus attractives

La croissance de l’écosystème des regtechs s’accompagne d’une augmentation progressive et significative de la rémunération des collaborateurs appelés à rejoindre ces jeunes pousses. «Dans les regtechs les plus matures, disposant d’une clientèle diversifiée et souvent internationalisée, il n’est pas rare que les salaires des ingénieurs et opérationnels avoisinent désormais ceux de leurs homologues en poste dans des institutions financières conventionnelles», indique Alain Clot, président-fondateur de France Fintech. A l’instar d’une majorité de start-up, les regtechs mettent en place des dispositifs d’intéressement – comme les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE) ou les bons de souscription d’actions (BSA) – leur permettant d’associer leurs collaborateurs à leurs performances.

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