Le groupement de moyens est un outil très utilisé, notamment par les entreprises du secteur financier, dans la mesure où il permet à ses membres d’obtenir des services en exonération totale de TVA. Cette exonération, sujette à des conditions strictes édictées par la directive TVA mais appliquées de façon plus ou moins extensive par les Etats membres de l’UE, a récemment fait l’objet de conclusions intéressantes. Saisi dans le cadre d’un recours en manquement contre le Luxembourg, l’avocat général a donné son opinion sur l’extension, abusive ou non, du régime luxembourgeois, l’enjeu étant pour les autres Etats membres d’obtenir des éclaircissements sur la validité de leur propre régime au regard des critères communautaires.
Par Sophie Dorin, avocat counsel, Bird & Bird
Depuis la saisine de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) par la Commission1 le 8 juin 2015 dans le cadre d’un recours en manquement à l’encontre du Luxembourg concernant sa transposition des dispositions de l’article 132.1 f de la directive 2006/112/CE2 sur les «groupements autonomes de personnes», les acteurs du secteur de la banque et de l’assurance mais aussi les mutuelles ou les hôpitaux, tous grands utilisateurs du dispositif, sont en attente de clarifications tant sur le statut du groupement de moyens que sur le périmètre de l’exonération de TVA qui en découle.
Les conclusions de l’avocat général Juliane Kokott, rendues le 6 octobre 2016, étaient ainsi très attendues.
1. Mais tout d’abord, qu’est-ce qu’un groupement autonome et à quoi sert-il ?
Du point de vue des adhérents, personnes physiques et/ou sociétés exonérées ou non assujetties à la TVA, constituer un groupement autonome de personnes leur permet de se regrouper et d’externaliser à ce dernier certaines de leurs activités tout en bénéficiant de l’exonération de la TVA sur les prestations achetées auprès du groupement.
Pour rendre le point concret, prenons un exemple.
Une mutuelle dont l’activité est exonérée de TVA souhaite acquérir une prestation informatique auprès d’un prestataire tiers. Si elle l’acquiert seule, elle supportera l’intégralité de la TVA sur l’acquisition. En revanche, si elle adhère à un groupement, ce dernier supportera certes la même TVA d’amont sur l’achat de la prestation au tiers mais le coût TTC de la prestation du groupement lui sera alors refacturé sans marge et en exonération de TVA à elle ainsi qu’aux autres adhérents du groupement ayant bénéficié du service.
L’exonération de TVA a aussi des effets indirects positifs dans la mesure où l’entreprise, en l’absence de cette disposition, aurait probablement répercuté ce coût sur le prix facturé au consommateur final.