Deux nouvelles décisions rendues par le Conseil d’Etat dans la saga Wendel clarifient l’appréciation des juges sur les régimes d’intéressement des cadres (CE 12/02/2020 n° 421444 et 421441).
Par Antoine Colonna d’Istria, avocat associé, Norton Rose Fulbright
Notre commentaire dans ces mêmes colonnes des décisions du 27 juin 2019 dans lesquelles le Conseil d’Etat refusait à l’administration fiscale de procéder à la requalification en salaire d’une fraction du gain réalisé par l’intermédiaire d’une société de personnes, sans écarter au préalable l’interposition de cette société, nous avait conduit à nous interroger sur la pertinence des fondements utilisés (par le fisc) dans ces affaires.
Dans la présente espèce, l’administration fiscale avait effectivement invoqué l’abus de droit, et l’on pouvait légitimement s’interroger sur la solidité d’un tel fondement. Le Conseil d’Etat estime cependant que l’abus de droit est caractérisé dès lors que la succession presque simultanée des opérations d’apport des titres de la société CDA à la société de personnes contrôlée par le contribuable, et du rachat de ses propres titres par la société CDA, a permis à ce dernier de bénéficier artificiellement du régime du sursis d’imposition de la plus-value d’apport prévu à l’article 150-0 B du CGI. L’interposition de la société de personnes n’aurait eu alors qu’un but exclusivement fiscal nécessairement contraire à l’objectif poursuivi par le législateur.
La qualification retenue par la haute assemblée suscite des interrogations, en particulier dans la mesure où elle écarte sans aucune justification l’argument pourtant très pertinent des contribuables selon lequel ils n’auraient reçu aucune liquidité et aucun désinvestissement n’aurait eu lieu....