Les critères d’identification d’un actif incorporel, fixés par la jurisprudence SA Sife il y a plus de vingt ans, sont toujours d’actualité. En particulier, le critère de cessibilité conserve aujourd’hui toute sa pertinence, comme l’a rappelé le Conseil d’Etat dans différentes décisions rendues au cours de l’année 2016.
Par Nicolas Riou, avocat, et Sandy Boverie, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre
Lorsqu’une entreprise acquitte des dépenses pour l’obtention de droits incorporels, elle doit nécessairement s’interroger sur le traitement fiscal qu’il convient de leur réserver. L’administration fiscale est en effet souvent tentée de contester leur déduction fiscale immédiate, en considérant que ces dépenses ne constituent pas des charges immédiatement déductibles, mais représentent plutôt le coût d’acquisition d’un actif incorporel devant, en conséquence, être immobilisé.
Il y a déjà plus de vingt ans que le Conseil d’Etat a défini les critères d’identification d’un actif incorporel. Dans une décision SA Sife rendue le 21 août 19961, le Conseil d’Etat a jugé que seules devaient être immobilisées les dépenses engagées en contrepartie de l’attribution de droits constituant une source régulière de profits, dotés d’une pérennité suffisante, et susceptibles de faire l’objet d’une cession.
Ces trois critères, et en particulier le caractère cessible des droits, conservent aujourd’hui toute leur pertinence, comme l’a confirmé le Conseil d’Etat au travers de trois décisions rendues au cours de l’année écoulée.
1. Le critère de cessibilité reste un critère pertinent, notamment pour déterminer si des redevances de marques doivent être immobilisées
Si les deux premiers critères, tenant à la pérennité des droits acquis, et à la régularité des profits qu’ils génèrent, sont constamment retenus par le juge de l’impôt pour caractériser un actif incorporel, le critère de cessibilité n’est en revanche pas toujours considéré comme décisif dans l’analyse.
En effet, l’activation de droits incorporels a parfois été confirmée par la jurisprudence sans que le critère de cessibilité ne soit rempli2.
Dans une première décision du 15 juin 20163, le Conseil d’Etat a cependant considéré que ce critère restait pertinent pour apprécier si des redevances de marques devaient être ou non immobilisées.
Le rapporteur public, dans ses conclusions rendues sous cet arrêt, s’était néanmoins demandé si ce critère de cessibilité devait être maintenu au regard de la définition des actifs immobilisés, issue de l’avis n° 2004-15 du 23 juin 2004 du CNC et du règlement no2004-06 du CRC.