La Commission européenne a publié le 15 décembre dernier sa proposition de règlement sur des marchés contestables et équitables dans le secteur numérique (Digital Markets Act). Ce nouvel outil de régulation est conçu pour mieux encadrer le comportement des plateformes les plus puissantes.
Par Michael Cousin, avocat associé, Ashurst.
Le texte présenté fin 2020 est l’aboutissement d’une réflexion remontant à la publication, en 2014, de la stratégie pour un marché unique numérique en Europe. Dans ce document, la Commission soulignait la puissance acquise par certains acteurs du numérique. Puissance inédite par son ampleur mais aussi en raison des mécanismes qui la sous-tendent. En effet, les effets de réseau générés par les plateformes numériques (plus un service est performant, plus il attire d’utilisateurs ; plus il attire d’utilisateurs plus il est performant) conduisent à des situations de « basculement » : le premier opérateur qui atteint une taille critique acquiert une position très difficilement contestable et contrôle ainsi l’accès à la communauté d’utilisateurs qu’il s’est constituée.
Les « contrôleurs d’accès » dans le viseur de la Commission
La question s’est un temps posée de savoir s’il convenait de laisser aux autorités de concurrence le soin de réguler le comportement de ces opérateurs à l’aide des outils classiques du droit de la concurrence. Toutefois, en dépit des amendes très importantes prononcées par ces autorités dans le secteur numérique, il est apparu que leur action présentait d’importantes limites, liées au premier chef à la longueur et à la complexité des procédures contentieuses.
C’est pourquoi la Commission a souhaité se doter d’un outil permettant de réguler les plateformes les plus puissantes sans qu’il soit besoin de déterminer leur éventuelle dominance au sens du droit de la concurrence, ni de caractériser un comportement abusif de leur part.