Il est de ces décisions qui démontrent que la théorie de la relativité s’appliqueà merveille à la pensée fiscale. Les occasions de le constater se renouvellent.Comme la Cour de cassation avait pu le juger en 2012, avant de se raviser en 2015, le Conseil d’Etat vient de décider que les titres d’une société constituent des immeubles (pour les besoins de la convention fiscale franco-belge).
Par Dimitar Hadjiveltchev, avocat associé, CMS Francis Lefebvre Avocats
1. Le contexte
Le contexte est a priori simple : un résident belge cède les titres d’une SCI française. L’administration française l’invite à payer l’impôt sur la plus-value en France. L’intéressé entend décliner cette invitation et pour ce faire, il dépose un recours pour excès de pouvoir en posant la question suivante au Conseil d’Etat : les parts de sociétés civiles immobilières françaises constituent-elles des immeubles au sens de la convention signée le 10 mars 1964 entre la France et la Belgique ?
Selon l’article 3 de cette convention, les revenus et les bénéfices résultants de l’aliénation de biens immobiliers ne sont imposables que dans l’Etat de situation des immeubles. L’alinéa 2 précise que la notion de bien immobilier se détermine d’après les lois de l’Etat contractant où est situé le bien.
En vertu de l’article 18, les revenus qui ne sont pas visés par un article spécifique sont imposables dans l’état de résidence du contribuable, soit la Belgique dans le cas du requérant.
Selon l’article 22 de la convention, tout terme non spécialement défini dans la convention a le sens que lui attribue la législation fiscale.
Pour corser légèrement le contexte, il est prévu, au protocole final de la convention, que les droits possédés dans des sociétés ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance suivent le traitement des immeubles.
L‘administration fiscale française a jugé, dans ses commentaires de la convention, que cette dernière disposition du protocole l’autorise à considérer que le même caractère immobilier doit être reconnu aux titres détenus dans toute société à prépondérance immobilière ainsi qu’aux titres de sociétés civiles immobilières (BOI-INT-CBV-BEL-10-10, paragraphe 130). C’est contre cette interprétation que le contribuable a déposé un recours pour excès de pouvoir auprès du Conseil d’Etat.