L’arrêt du 2 septembre 2015 (Groupe Steria SCA, C 386/14) ouvre aux groupes français d’intéressantes perspectivesde réclamation mais suscite aussi certaines craintes pour l’avenir.
Par Daniel Gutmann, avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre,
professeur à l’Ecole de droit de la Sorbonne (Université Paris-1)
1. Le problème
L’article 216 du CGI prévoit que les produits de participation bénéficiant du régime mère-fille sont exonérés d’impôt sur les sociétés sous réserve de l’application d’une quote-part de frais et charges (QPFC) dont le taux est fixé à 5 % du produit total des participations. Ces dispositions sont applicables à tous les dividendes reçus sous le régime mère-fille par une société soumise à l’IS en France, que ces dividendes trouvent leur source en France ou dans des distributions provenant de filiales situées notamment dans d’autres Etats membres de l’UE. L’article 223 B du CGI précise cependant que, dans le cadre de l’intégration fiscale, la QPFC attachée aux dividendes reçus par les sociétés du groupe à raison de leur participation dans d’autres sociétés du groupe est neutralisée et vient ainsi en déduction du résultat d’ensemble du groupe.
Lorsque le dividende provient d’une filiale détenue à plus de 95 % par la société tête de groupe, mais qui n’est pas soumise à l’IS en France, cette distribution ne peut pas bénéficier de la neutralisation de la QPFC, puisqu’une société doit être soumise à l’IS en France pour pouvoir être membre du groupe d’intégration fiscale.
Ce traitement différent des dividendes reçus de filiales selon qu’elles sont ou non membres du groupe d’intégration fiscale a été critiqué au regard de la liberté d’établissement. Par un arrêt du 29 juillet 2014, la CAA de Versailles a ainsi considéré que la question soulevait une difficulté sérieuse d’interprétation du droit de l’UE et a soumis une question préjudicielle à la CJUE. C’est cet arrêt qui est ici commenté.