Dossier Export et Finance

A l’export, le risque d’impayés retrouve les sommets

Publié le 16 juin 2022 à 11h55

Anne del Pozo    Temps de lecture 7 minutes

La reprise économique persiste, mais le risque d’impayés se renforce. Dans ce contexte dual, caractérisé par de forts vents contraires, comment les entreprises envisagent-elles leur développement export ? Les experts d’Allianz Trade, leader mondial de l’assurance crédit, décryptent l’environnement économique actuel.

Quelles perspectives pour l’économie mondiale à court et à moyen terme ? Selon Allianz Trade, la croissance économique mondiale atteindra + 3,3 % en 2022 et + 2,8 % en 2023. Dans le même temps, les échanges commerciaux en volume devraient croître de + 4 % cette année. De quoi offrir plusieurs débouchés commerciaux aux entreprises françaises désireuses de développer leur activité export.

D’importants vents contraires qui pourraient renforcer le risque d’impayés

Malgré ces perspectives positives, les entreprises font à nouveau face à d’importants vents contraires à l’échelle mondiale : perturbations prolongées des chaînes d’approvisionnement, goulots d’étranglement affectant les transports, hausse du prix des matières premières, pénuries de certains intrants, voire de main-d’œuvre, etc. En parallèle, elles doivent également faire face à une hausse des coûts de financement dans un contexte d’accélération de l’inflation et de resserrement des politiques monétaires. Autant d’éléments qui pèsent sur leur rentabilité, leur activité et leur trésorerie.

Par ailleurs, plusieurs poches de fragilités pourraient avoir pour résultat une hausse prononcée des défaillances d’entreprises à l’échelle mondiale en 2022 et 2023. Tout d’abord, en 2021, le BFR s’est particulièrement accru en Asie (+ 2 jours), en Europe centrale et de l’Est (+ 2 jours) et en Amérique latine (+ 2 jours). Une tendance également observée dans certains secteurs comme les équipements des ménages (+ 8 jours), l’électronique (+ 3 jours) et les machines et équipements (+ 2 jours). Ensuite, en zone euro, le ratio dette/PIB des entreprises non financières s’est considérablement dégradé en 2021 (+ 5,2 points, contre + 3,5 points pour les Etats-Unis). Enfin, le contexte international actuel a engendré un déclin du pouvoir d’achat des ménages, et pourrait résulter en un ralentissement de la demande des consommateurs.

Dans ce contexte, Allianz Trade estime que les défaillances d’entreprises à l’échelle mondiale croîtront de + 10 % en 2022 et de + 14 % en 2023 (– 12 % en 2021), se rapprochant ainsi de leur niveau pré-Covid-19. Selon Allianz Trade, les défaillances d’entreprises retrouveront leurs niveaux d’avant-crise en 2022 dans un pays sur trois. Pour un pays sur deux, cette normalisation aura lieu en 2023. En Europe de l’Ouest, on devrait observer deux tendances distinctes : au Royaume-Uni et en Espagne, le nombre de défaillances dépassera son niveau de 2019 dès la fin de cette année, tandis qu’en Italie, au Portugal et dans les pays nordiques, la normalisation ne se produira qu’en 2023.

Face au contexte actuel, l’optimisme des exportateurs européens s’effrite

Comment les entreprises perçoivent-elles l’environnement économique actuel ? Selon le dernier Allianz Trade Global Survey, un événement, dont les conséquences économiques seront indirectes mais lourdes, pèse sur l’optimisme des exportateurs : l’invasion de l’Ukraine.

Avant l’invasion de l’Ukraine, les entreprises semblaient plutôt optimistes : elles étaient, au total, 94 % à attendre une hausse de leur chiffre d’affaires export, les entreprises les plus optimistes étant celles de France et d’Italie (97 %). 79 % des répondants prévoyaient même d’étendre leur activité internationale à d’autres marchés, avec un volontarisme particulièrement accru pour les exportateurs chinois (92 %) et américains (84 %), suivis en Europe par les Italiens (77 %) et les Français (75 %).

Mais l’agression militaire subie par l’Ukraine et les sanctions massives imposées à l’économie russe ont changé la donne. « Sans surprise, la guerre a affecté l’optimisme des exportateurs : la part des répondants prévoyant une hausse de leur chiffre d’affaires à l’export en 2022 est passée de 94 % à 78 % (– 16 points) suite à l’invasion de l’Ukraine. En Italie et en France, où les entreprises étaient les plus optimistes, respectivement 29 % (+ 26 points) et 23 % (+ 20 points) des exportateurs s’attendent désormais à une baisse de leur chiffre d’affaires à l’export en 2022. Même si l’Ukraine et la Russie ne sont pas des marchés finaux clés pour les exportateurs européens, la situation actuelle affecte les échanges internationaux via des canaux indirects (supply chains, matières premières, énergies), et pèse ainsi sur les opportunités export des entreprises », explique Françoise Huang, économiste senior en charge du commerce mondial chez Allianz Trade.

Un exportateur français sur deux craint une résurgence du risque d’impayés en 2022

D’autre part, l’exposition des exportateurs au risque d’impayés semble s’être récemment accrue : 50 % des répondants à l’Allianz Trade Global Survey déclarent qu’ils ont observé des délais de paiement plus longs en 2021. Les exportateurs français sont 62 % à aller dans le même sens.

Le risque d’impayés restera d’ailleurs un vrai sujet pour les exportateurs en 2022 : plus de la moitié des répondants s’attendent à une résurgence du risque d’impayés en 2022, et 40 % des répondants s’attendent à un allongement des délais de paiement. En France, 49 % des entreprises s’attendent désormais à une résurgence du risque d’impayés en 2022, et 33 % à un allongement des délais de paiement.

Le risque d’impayés se renforce, et les exportateurs en sont conscients. Pour saisir les opportunités qui existent à l’international, malgré un environnement économique et politique complexe, un seul mot d’ordre à retenir pour les deux prochaines années : vigilance ! 

Questions à Frédérique Vernerey-Alliaume, directrice commerciale et marketing d’Allianz Trade en France

Pour réussir à l’export, il faut disposer d’un maximum de données sur ses clients et prospects. Comment ? Frédérique Vernerey-Alliaume, directrice commerciale et marketing d’Allianz Trade en France, partage ses conseils pour développer son activité internationale sans s’exposer au risque d’impayés.

Quel est le secret pour réussir son développement export ?

Un exportateur ne peut pas se permettre d’entreprendre une relation commerciale avec une entreprise dont il ne sait rien. Pour éviter les mauvaises surprises, il doit identifier les meilleures opportunités et les partenaires les plus fiables. Il doit donc obtenir un maximum d’informations financières et stratégiques sur ses partenaires commerciaux tout au long de la relation commerciale. La réussite à l’export passe incontestablement par cette étape de prévention et surveillance, qui permet de limiter l’exposition de la trésorerie au risque d’impayés, mais surtout d’assurer le développement commercial. La difficulté, c’est qu’à l’international, l’accès à l’information est complexe et diffère d’un pays à l’autre.

Comment faire pour lever ce frein de l’accès à l’information ?

Il peut être pertinent de solliciter un tiers expert de confiance, comme un assureur crédit, pour s’informer sur ses clients et prospects. Chez Allianz Trade, nous récoltons et analysons des informations sur plus de 80 millions d’entreprises dans le monde entier. Nous avons aussi accès à des données privilégiées sur les entreprises, notamment grâce à l’expérience de paiement de nos assurés avec plus de 90 ans d’historique. Nos 1 200 experts du risque, implantés dans plus de 50 pays, sont en contact régulier avec les dirigeants d’entreprises pour faire le point avec eux sur la situation de leur trésorerie, leurs perspectives d’activité et leur stratégie. Nous offrons à nos clients une vision précise et actualisée de la solvabilité des entreprises, ce qui leur permet de se concentrer sur les meilleures opportunités commerciales sans craindre le risque d’impayés. Par ailleurs, nos économistes suivent les risques pays et sectoriels, nous permettant ainsi d’accompagner nos clients avec une vision microéconomique et macroéconomique.

Comment accompagnez-vous les entreprises dans leur développement à l’export ?

Nous voulons donner confiance en l’avenir aux entreprises et être partenaire de leur développement à l’export. Pour cela, nous proposons un éventail complet de dispositifs d’assurance crédit court terme. Ces solutions permettent aux exportateurs de protéger leur trésorerie au travers de trois services : la prévention, le recouvrement et l’indemnisation. Nous avons également mis en place une solution pour les exportateurs souhaitant couvrir des opérations ponctuelles à moyen terme contre les risques d’interruption du contrat et d’impayés. 

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